lundi 10 mars 2008

Voici un court résumé de l'histoire de la Roumanie, avec ses grandes étapes, pour vous aider à comprendre la complexité de ce pays et de ses régions, et notamment de la Transylvanie, qui était l'une des trois principautés médiévales, avec la Moldavie (à ne pas confondre avec la République moldave, état indépendant situé entre la Roumanie et l'Ukraine, dont la langue officielle est également le roumain) et la Valachie, dont la réunion résulta en la création de la Roumanie actuelle.

Vous y trouverez notamment des informations sur la véritable histoire de Vlad Ţepeş, prince valaque du XVe qui inspira à Bram Stocker la légende de Dracula, sur la période monarchique, ainsi que sur la période communiste de 1947 à 1989.

Tous les chapitres ne tenant pas sur la page courante en raison d'un manque de place, il vous suffit, pour les voir tous, de cliquer à droite de l'écran dans "Archive de blog" sur le mois de janvier pour les afficher tous sur la page courante, ou sur la flèche devant le mois de janvier pour accéder séparément aux liens des 15 chapitres composant cet historique.


jeudi 24 janvier 2008

Des géto-daces à la Dacie romaine


C’est au Ier millénaire avant J.-C. que les gètes et les daces, descendants des thraces, s’installent sur le territoire compris entre les Carpates, le Danube et la Mer Noire.

Sur les bords de la Mer Noire, ils s’intègrent progressivement aux colonies grecques, tandis qu’en Valachie et Transylvanie, ils bâtissent dès le IIIe siècle avant J.-C. de puissantes forteresses.

Au début du IIe siècle après J.-C., attirés par l’or des Carpates, les romains décident d’envahir la région et mettront cinq ans à triompher du roi Décébale. (Ces conquêtes sont gravées en frise sur la Colonne Trajane, que vous pouvez voir sur le forum de Trajan, à Rome : http://fr.wikipedia.org/wiki/Colonne_Trajane ).

Rome s’enrichit alors d’une nouvelle province, la Dacie, qui, devenue l’une des plus riches, est surnommée Dacia Felix, « la Dacie heureuse ».

C’est ainsi que le latin parlé dès lors par le peuple daco-romain a imprégné pour toujours la langue roumaine.

Mais en 271-275, les barbares déferlant de l’est amènent l’empereur Aurélien à abandonner la Dacie et à se replier de l’autre côté du Danube.

La Dacie sera alors confrontée à des vagues de migrations successives : goths, huns, gépides, slaves, avars, petchenègues, coumans, tatars, etc. mais seuls les slaves, arrivés à partir du VIe siècle, laisseront une emprunte notable dans la langue roumaine, sans toutefois lui ôter sa spécificité latine.

mercredi 23 janvier 2008

Trois régions, trois destins parallèles


Après plusieurs siècles de silence dans les sources écrites comme dans les indices archéologiques, le peuple roumain réapparaît au Xe, parlant une langue latine et pratiquant le christianisme orthodoxe de Byzance.

De tous les envahisseurs s’étant attaqués au territoire, seules les magyars, établis dans l’actuelle Hongrie à la fin du IXe siècle, vont s’installer durablement.

Dès le IXe, effectivement, leur roi Arpad investit le pays « au-delà des forêts », trans silvania.

En 1003, le roi Etienne Ier fait entrer pour des siècles la Transylvanie dans la mouvance de la Hongrie.

Afin de renforcer ces territoires que traversent les tatars chaque fois qu’ils déferlent sur la Hongrie, les souverains hongrois attirent dès le milieu du XIIe siècle des colons allemands, appelés « saxons », pour fortifier et mettre en valeur les territoires du sud de la Transylvanie.

D’autres peuples d’origine hongroise, les sicules, ont eux pour mission de défendre le flanc est du royaume, en échange de leur autonomie.

Dans le même temps, des petits pouvoirs s’organisent sur le versant oriental des Carpates, pouvoirs que l’autorité hongroise entend soumettre.

C’est sans compter le désir d’indépendance qui anime ces deux régions : la Valachie ou « pays roumain » et la Moldavie.

Elles vont, avec la Transylvanie, connaître un destin parallèle et finir par former les trois grandes provinces de la Roumanie d’aujourd’hui.



mardi 22 janvier 2008

Emancipation de la tutelle hongroise et passage sous la tutelle ottomane


La Valachie est la première à s’émanciper en 1330, après la victoire de Basarab sur le roi de Hongrie.

La Moldavie s’affranchit elle aussi, dès 1359, de la tutelle hongroise et s’érige, tout comme la Valachie, en principauté.

Mais à partir de 1393, les ottomans occupent la Bulgarie et convoitent la Valachie, qui devra bientôt, dès 1411, lui payer le « tribut », symbole de la vassalité.

En 1456 la Moldavie connaîtra le même sort et passera sous tutelle ottomane.

Toutefois, en payant tribut aux ottomans, les principautés échappent à sa tutelle directe et aux conversions massives à l’Islam.

En Transylvanie, les roumains sont marginalisés par les rois hongrois qui s’obstinent à convertir au catholicisme les peuples qu’ils dominent. De plus, tant qu’ils restent orthodoxes, les chefs roumains n’ont aucun espoir d’appartenir à la noblesse magyare, l’une des trois nations de Transylvanie, avec les sicules et les saxons.

Certains vont alors préférer se convertir, comme la famille de Iancu de Hunedoara, qui régnera sur la Transylvanie sous le nom de Jànos Hunyadi et dont le fils Matei Corvin (ou Matthias Corvin) va même devenir l’un des plus grands rois de Hongrie (1458-1490). Sa maison natale est à Cluj.

Dans chaque principauté, un prince (« voïvode » ou « hospadar »), règne depuis sa capitale. Il est élu par les « boyards », barons locaux, et choisi parmi les mâles de la famille régnante.

A l’origine d’une instabilité politique chronique, ce système précaire ne va cesser de s’aggraver jusqu’au XIXe siècle.

lundi 21 janvier 2008

Portrait de Vlad III Ţepeş

Vlad III Ţepeş, l'histoire du "vrai" Dracula


Vlad III Ţepeş (ou Vlad Dracul, ou Vlad l'Empaleur, ou Drăculea) est né à Sighişoara en 1431 et mort en 1476 à Bucarest.

Il est issu de la famille des Basarabi, à laquelle on doit nombre de personnages historiques en Valachie, et en Transylvanie. Il donnera descendance à la famille Bellery, qui vit actuellement en France. Le dernier descendant actuel est Gwénaël Bellery, comte de Transylvanie. La descendance illégitime de Vlad III Ţepeş (par son fils Mihnea le Mauvais, prince de Valachie de 1508 à 1509), compte l’ascendance directe de la famille royale de Windsor !

A l’âge de 11 ans, en 1442, il est envoyé comme otage au sultan Murad II, avec son jeune frère Radu III l'Élégant ; il est retenu en Turquie jusqu'en 1448, et son frère jusqu'en 1462.

A l’instar d’autre princes de son temps, Vlad III Ţepeş, dit Vlad l’Empaleur (de « teapa », qui signifie pieu, en roumain), qui inspirera à Bram Stocker en 1897 le mythe de Dracula, accède au Trône de Valachie en 1456 dans un bain de sang.

Devant son refus de payer tribut aux ottomans, le sultan dépêche des émissaires porteurs d’un ultimatum et secrètement chargés de lui trancher la tête. Mais Vlad déjoue le piège et les fait empaler vivants. C’est de cette pratique, courante à l’époque, mais qu’il affectionnait tout particulièrement, qu’il tiendra son surnom d’Empaleur.

Le roi de Hongrie, Matei Corvin (ou Matthias Corvin), dont Vlad avait épousé la sœur, l'avait, dans un premier temps, soutenu dans toutes ses actions, surtout celles contre les turcs, mais, changeant d'attitude politique, il se mit à soutenir le frère de Vlad, Radu III l'Élégant (Radu cel Frumos), qui était le candidat des ottomans et le chef des armées ottomanes, alors que Vlad était vaincu et lui demandait de l'aide, seul à Braşov.

Pour le discréditer et justifier son revirement, Matei Corvin fera circuler, dans l’Europe du XVe siècle, de nombreuses anecdotes, dont voici un exemple :

« Il fit décapiter plusieurs de ses nobles et utilisa leurs têtes comme appâts pour les écrevisses ; après quoi, il invita leurs amis chez lui, leur offrit ces écrevisses à manger et leur dit « Vous êtes en train de manger les têtes de vos amis ». Après quoi il les fit empaler ».

Ce même roi Matei Corvin le fera prisonnier et c’est à cette occasion qu’il sera enfermé pendant deux mois dans le château de Bran, à tort présenté comme le Château de Dracula en raison de son apparence, source d'inspiration pour Bram Stocker, car le château n’a en réalité jamais fait partie du territoire gouverné par Vlad Ţepeş…

Ses ennemis, les marchands saxons et les boyards (nobles) de Transylvanie qui ont toujours lutté pour conserver leurs privilèges dans ces régions, contribueront également à cette campagne visant à jeter le discrédit sur le prince, bien que l’on sache que sa réputation de prince sanguinaire n’est absolument pas usurpée !

Vlad Ţepeş dirigera effectivement également sa vengeance contre les boyards responsables de la mort de son père assassiné et de son frère Mircea (enterré vivant !). Ainsi, on raconte que le dimanche de Pâques 1459, il arrêtera toutes les familles de boyards qui faisaient la fête à la cour princière. Après avoir mis au pal les plus vieux, il oblige le reste à marcher jusqu'à la ville de Poenari. La route fait une centaine de kilomètres, et est difficile. Il ne permet pas aux survivants de se reposer à leur arrivée, et leur ordonne immédiatement de construire une forteresse sur les ruines d'un ancien avant-poste, avec vue sur l'Argeş. Beaucoup meurent. Vlad crée une nouvelle noblesse parmi ses paysans, et réussit à se faire construire rapidement une forteresse avec l'ancienne.

On prétendait même que Vlad Ţepeş buvait le sang de ses victimes, qu'il « sauçait » son pain avec !

On sait aussi de lui qu’il était inflexible lorsqu'il s'agissait d'honnêteté et d'ordre. La plus petite infraction, du mensonge jusqu'au crime, pouvait être punie du pal.

Pour résumer, Vlad connaissait les vertus pédagogiques de la terreur.

Sûr de l'efficacité de sa loi, on raconte que Vlad plaça un jour une coupe en or en plein milieu de la place centrale de Târgovişte. Les voyageurs assoiffés avaient le droit de se servir de la coupe mais elle devait rester en place. Selon les sources historiques, celle-ci ne fut jamais dérobée, et resta pratiquement inutilisée tout le temps du règne de Vlad.

Des chroniques locales racontent comment, pour punir des émissaires turcs de ne pas s’être découverts en sa présence, il ordonna que leur fez (turban) soit cloué sur leur crâne.

D’autres chroniques racontent encore qu’après avoir rassemblé de nombreux pauvres et infirmes dans une salle fermée, sous prétexte de leur fournir de la nourriture, il y fit mettre le feu.

Vlad Ţepeş était donc connu pour ses techniques de punition brutales ; selon les dires des boyards saxons de Transylvanie, il ordonne que les punis soient écorchés, bouillis, décapités, rendus aveugles, étranglés, pendus, brûlés, frits, cloués, enterrés vivants, etc. Il aimait couper le nez de ses victimes, les oreilles, les organes génitaux, et la langue.

Mais sa méthode favorite est la mise au pal, d'où son surnom d'Empaleur : on enfonce un pieu, si possible par l'anus pour les hommes ou par le vagin chez les femmes, et on le fait ressortir par la bouche, puis on laisse le pal sur lequel la victime pourrit pendant des jours à la vue de tous.

Ses victimes se comptèrent en milliers, en dizaines de milliers, voire même en centaines de milliers selon certaines sources.

Il applique cette technique en 1457, en 1459 et en 1460 contre les commerçants de Transylvanie qui se rebellent contre ses lois.

En 1457, les commerçants de Sibiu essaient de le remplacer par un Prêtre des roumains, identifié comme étant le futur souverain Vlad IV Călugărul ( mot signifiant le "moine" en roumain), qui leur promet des avantages douaniers. Quant à Vlad, il se rendra, la même année, en Moldavie, pour aider Etienne le Grand (Stefan cel Mare en roumain) à chasser du trône l’héritier de son père.

Les roumains doivent notamment à Etienne le Grand, dont le règne (1457-1504) sera secoué par les guerres et les trahisons, les monastères de Moldavie, dont 24 subsistent encore.

Son fils Petru Rareş (1527-1538) continuera l’œuvre de son père avec la construction de nouveaux monastères et fera couvrir les églises du nord de la Moldavie de superbes fresques murales aujourd’hui renommées dans le monde entier.

L’esprit bâtisseur sera relayé par ses successeurs, sous la dépendance croissante des ottomans.

En Roumanie, Vlad Ţepeş, certes prince sanguinaire, est donc un héros national pour avoir résisté aux turcs, et vous verrez beaucoup de représentations de son célèbre portrait…

Son histoire et ses mœurs médiévales inspirèrent, en 1897, un écrivain irlandais, Bram Stocker.

Quant au surnom de Dracula (Drăculea), « dracul », en roumain, signifie « le diable » ou « le dragon » et fait probablement, à l’origine, également référence à l’Ordre du Dragon auquel appartenait son père.


Vlad Ţepeş est tué en 1476, sans que l'on sache s'il s'agit ou non d'un assassinat. L'hypothèse la plus vraisemblable est qu'il a été tué au combat par les turcs.

Par contre, on sait qu’il a été décapité et que sa tête a été envoyée au sultan, qui la pique sur un pieu comme preuve qu'il est bien mort.

Vlad Ţepeş est enterré au monastère de Snagov, sur une île proche de Bucarest. Selon l'historien réputé Constantin Rezachevici, ce tombeau pourrait être situé sur la localité du monastère de Comana (Constantin Rezachevici „Unde a fost mormântul lui Vlad Tepes?“ (II), Magazin Istoric, nr.3, 2002, p.41).

Des études récentes ont montré que le « tombeau » de Vlad Ţepeş au monastère de Snagov ne contenait que quelques ossements de chevaux, datés du néolithique.

D'après le livre de Radu Florescu et Raymond McNally (A la Recherche de Dracula), il y a deux tombes à Snagov. La première à l'entrée de la chapelle et la seconde au pied de l'autel. On s'accorde généralement à dire que c'est la seconde qui était censée contenir le corps (décapité) de Vlad Ţepeş.

En 1932, une mission archéologique roumaine ouvrit cette tombe et n'y trouva que quelques ossements mâchonnés. L'autre tombe fut également ouverte. L'équipe d'archéologues y découvrit un squelette d'homme en très mauvais état, privé de sa tête, une épée, une médaille de l'Ordre du Dragon, une couronne, les restes d'une cape violette et une bague de femme, cousue à l'intérieur de ce qui fut autrefois la manche d'un vêtement (tradition d'amour courtois très répandue en Europe à la fin du Moyen-Age et que Vlad Ţepeş put apprendre lors de ses séjours avec son père à la cour de l'Empereur Sigismond à Nuremberg).

Certains prétendirent que trouver un corps dans cette tombe n'était finalement pas très étonnant : Vlad Ţepeş avait abjuré sa foi orthodoxe et s'était converti au catholicisme pour pouvoir remonter sur le trône et être soutenu par Matei Corvin. Il était donc considéré comme un hérétique par les moines orthodoxes qui mirent son corps en terre. Un hérétique certes mais de sang royal : on aurait donc très bien pu lui accorder de reposer dans la chapelle (certainement grâce à l'influence des frères Bobrin, ses gardes du corps), mais à l'entrée. Ainsi, les fidèles et les moines auraient marché sur sa tombe chaque jour en signe de mépris.

Avec l'avènement de la génétique, on s'intéressa de nouveau au corps trouvé dans la chapelle en 1932 pour tenter de l'authentifier en comparant son ADN à celui des descendants de Vlad III Ţepeş encore en vie. La nouvelle se répandit alors que le corps ainsi que tous les objets découverts avec lui auraient mystérieusement disparu des réserves du Musée d'Histoire et d'Archéologie de Bucarest, peut-être volés. Ils restent à ce jour introuvables.

Pour revenir à notre histoire et fermer cette parenthèse, la Transylvanie tombera en 1526 sous la coupe de l'empire ottoman.

L’ère des princes locaux moldaves s’achèvera, elle, presque 200 ans plus tard, en 1711.


vendredi 18 janvier 2008

Les trois principautés de Transylvanie, Valachie et Moldavie sous la coupe des grandes puissances


Depuis le XIIIe, et pendant 9 siècles, la Transylvanie est marquée par le rayonnement des saxons, à l’origine de l’essor des villes de Sighişoara, Braşov et Sibiu, ainsi que de l’édification de plus de 300 villages fortifiés, chefs d’œuvre de l’urbanisme européen médiéval.

Ouverte à l’occident, la Transylvanie reçoit l’influence de la réforme protestante tout en continuant les échanges économiques, culturels et politiques avec la Valachie et la Moldavie. Le règne de Michel le Brave (Mihai Viteazul), prince valaque, va même voir une réunion éphémère des trois territoires, en 1600.

En 1699, par le traité de Karlowitz, les ottomans cèdent la Transylvanie à l’empire des Habsbourg.

En Valachie et Moldavie, les ottomans désignent les princes qui épuisent les territoires dont ils ont la charge. Les campagnes régressent, et de nombreux paysans se réfugient en Transylvanie, Russie, voire au sud du Danube, au sein de l’empire ottoman, où la vie est plus supportable.

Certains « hospadars » (princes phanariotes désignés par les ottomans et originaires du quartier grec de Constantinople dénommé le « Phanar »), vont cependant tenter d’entreprendre des réformes, prémices au fondement d’un état moderne, d’autant plus que certaines élites phanariotes sont ouvertes aux idées des Lumières.

Dans ce contexte s’affirme la prise de conscience d’une identité roumaine dont les valeurs sont transmises par l’Eglise et les académies valaques, moldaves et transylvaines.

En 1774, le traité de Kütchük-Kaïnardji, en vertu duquel le tsar de Russie obtient la liberté de circulation sur la Mer Noire, révèle la faiblesse des ottomans et consacre la Russie comme la grande puissance régionale.

Cette longue histoire d’amour entre les pays roumains et la Russie sera renforcée en 1812 lorsqu’Alexandre Ier annexera la Bessarabie, vaste portion de la Moldavie.

La Bucovine, berceau historique de la Moldavie (c’est là que se trouvent de nombreux monastères) sera, elle, cédée en 1775 par les ottomans à l’Autriche et demeurera autrichienne jusqu’en 1918.

En 1829, le traité d’Andrinople fait passer la Moldavie et la Valachie sous influence russe. Pendant ce temps, la modernisation est en marche et le sentiment national roumain voit ses revendications se préciser : union des pays roumains et indépendance nationale, notamment.

Cependant, lorsque la flambée contestataire de 1848 traverse l’Europe et parvient en Roumanie, elle est vite réprimée par les russes et les ottomans co-suzerains.

jeudi 17 janvier 2008

De l'affirmation d'un sentiment national à l'union de la Valachie et de la Moldavie


Pendant ce temps, en Transylvanie, la population roumaine partage l’enthousiasme de la révolution hongroise de Kossuth qui embrase Vienne en mars 1848.

Mais la confiance s’écroule lorsque la Hongrie entend annexer la Transylvanie sans impliquer la population roumaine majoritaire, laquelle aspire depuis si longtemps à une reconnaissance de ses droits, politiques comme religieux.

Malgré les tentatives de mobilisation, la Transylvanie sera engloutie en 1867 au sein de l’empire austro-hongrois dans le royaume de Hongrie, qui opère une magyarisation forcée et inflige au peuple roumain un cortège de vexations enterrant tout espoir de cohabitation intelligente dans la région.

En 1859, une première unité roumaine sera réalisée, les assemblées de Moldavie et de Valachie élisant le même prince, Cuza, et l’union étant reconnue par les ottomans en 1861.

De la politique de cette union découlera la précipitation de l’autonomie de l’Eglise orthodoxe roumaine, événement de poids dans la constitution d’un sentiment national.

mercredi 16 janvier 2008

L'indépendance et une famille royale d'origine allemande



Après le renversement de Cuza en 1866, le progressiste Bratianu, qui s’était réfugié à Paris après 1848, se voit confier la mission de trouver un prince à placer au pouvoir.

Il réussit à convaincre Charles de Hohenzollern-Sigmaringen, un prussien de 27 ans, qui en 1866, est installé par l’assemblée à la tête des provinces unies de Moldavie et de Valachie.

Bien qu'il ne soit pas très grand, et un peu frêle, le prince Charles est un militaire parfait, en bonne santé et discipliné, et aussi un très bon politicien, avec des idées libérales. Il connait bien plusieurs langues européennes. Sa famille est très liée à la famille Bonaparte, et il a de très bonnes relations avec Napoléon III. La Roumanie est à ce moment sous l'influence de la culture française et la recommandation de Napoléon III vis-à-vis du prince Charles pesait un grand poids aux yeux des politiciens roumains de ce temps, outre ses liens de sang avec la famille des souverains prussiens. Le jeune Charles voyage incognito en chemin de fer, sous le nom de Karl Hettingen, sur la voie Düsseldorf-Bonn-Fribourg-Zurich-Vienne-Budapest, en raison de la situation conflictuelle entre le pays et l'Autriche-Hongrie. Arrivé sur le sol roumain, Bratianu s'incline devant lui et lui demande de rejoindre son attelage (à ce moment, la Roumanie n'a pas de voies de chemin de fer).

On a dit que le roi Charles avait une personnalité froide. Il était tout le temps préoccupé par le prestige de la dynastie qu'il avait fondée. Sa femme Élizabeth disait de lui qu'il « portait sa couronne au lit ». Il était très méticuleux et essayait d'imposer son style à tout son entourage. Malgré son dévouement à son travail de prince et roi roumain, il n'a jamais oublié ses racines allemandes.

En 48 ans de règne (le plus long règne qu'une principauté roumaine n'ait jamais connu), il travaille à ce que la Roumanie gagne son indépendance, il hausse son prestige, il participe au redressement de son économie, et il installe une dynastie. Il construit dans les Carpates, près de la frontière austro-hongroise (la Transylvanie appartient encore à l'Autriche-Hongrie), le château de Peleş (voir http://un-tour-en-transylvanie.blogspot.com/), construit dans un style allemand, comme un rappel des origines germaniques du roi.

La dépendance, même symbolique à présent, vis-à-vis de Constantinople, est devenue insupportable, et en 1876, Charles se range aux côtés de la Russie dans la guerre qui oppose l’empire des tsars à celui des sultans.

En 1878, le congrès de Berlin entérine l’indépendance de la Roumanie qui adopte en 1881 le drapeau tricolore bleu-jaune-rouge et dont Charles deviendra le premier roi, Carol Ier, le 22 mai 1881.

Après la proclamation du royaume en 1881, la question de la succession est très importante. Comme le frère du roi, Léopold, puis son neveu Guillaume, refusent la couronne, son second neveu, Ferdinand, un prince allemand, est nommé prince de Roumanie et héritier du trône. Élisabeth, la reine, épouse de Carol Ier, essaie d'influencer le tout jeune prince, qui vit maintenant à Sinaïa, pour qu'il épouse une amie intime, qui est aussi une écrivaine célèbre, Hélène Vacaresco. Selon la constitution roumaine toutefois, il est interdit au prince d'épouser une roumaine. À cause de cela, Élisabeth est exilée deux ans à Wied, jusqu'à ce que Ferdinand épouse la princesse Marie d'Édimbourg, petite-fille coté paternel de la reine Victoria du Royaume-Uni et petite-fille, côté maternel, du tsar Alexandre II de Russie.

Ferdinand Ier succèdera donc à son oncle Carol Ier en 1914. Se voyant promettre des avantages territoriaux par les deux camps en échange de son soutien au début de la première guerre mondiale, la Roumanie finit par se ranger du côté des alliés en août 1916.

Le pays fera donc partie du camp des vainqueurs le 11 novembre 1918.

mardi 15 janvier 2008

Naissance de la Grande Roumanie et deuxième guerre mondiale


Le 1er décembre de la même année 1918, la grande assemblée des roumains de Transylvanie et de Hongrie se réunit et vote à l’unanimité de ses 600 députés élus au suffrage universel et de 628 représentants d’institutions l’union à la Roumanie.

En 1919, la Roumanie signe les traités de St Germain et de Neuilly qui lui attribuent la Bucovine et le sud de la Dobrogea.

Le 4 juin 1920, par le traité de Trianon, signé au Grand Trianon à Versailles, la Hongrie cède la Transylvanie, la Crişana (partie ouest de la Roumanie actuelle), et le Banat (sud-ouest).

En Octobre, la Roumanie recevra également la Bessarabie.

La Grande Roumanie, dont la superficie comme la population se voient doublées, est née.

Le roi Ferdinand Ier et la reine Marie sont sacrés souverains de la Grande Roumanie en 1922.

A la mort du roi Ferdinand, en 1927, le trône reviendra à son petit-fils, Michel, âgé de 6 ans.

En effet, le père de ce dernier, le prince héritier Carol, s’était illustré par ses frasques dès 1918, 9 ans plus tôt, lorsqu’il se cacha à Odessa pour épouser une certaine Zizi Lambrino, dont il eut un fils en 1920. Le palais royal refusa cette liaison et fit annuler le mariage. Carol se soumit alors et épousa, conformément au choix de ses parents, Hélène de Grèce, qui lui donnera un fils, Michel en 1921. Mais un nouveau scandale va éclater lorsque Carol s’éprend d’Elena Lupescu-Wolf, petite-fille d’un rabbin de Bessarabie. A Paris, où se réfugient les amants, il fera savoir à son père le roi Ferdinand qu’il renonce au trône. C’est ainsi que lorsque celui s’éteindra, en 1927, la couronne passe directement à son petit-fils, fils de Carol et d’Hélène de Grèce, le prince Michel, qui devient roi à l’âge de 6 ans.

Carol reviendra toutefois d’exil 3 ans plus tard, et récupérera le trône, devenant le roi Carol II. Il imposera sa maîtresse Elena Lupescu, et la reine Hélène devra partir…

Le roi Carol II contribuera à l’essor du pays, qui connaît un développement sans précédent durant les années 30, mais son règne finira par encourager la corruption politique et fera perdre sa crédibilité au système démocratique. Le roi, se rapprochant du mouvement légionnaire contrôlé par le IIIe Reich, fait alors progressivement basculer le pays dans la dictature.

En 1939, la Roumanie proclamera tout d’abord sa neutralité dans la seconde guerre mondiale, mais, sous la pression germano-soviétique, finira par céder, en 1940, à l’U.R.S.S., la Bessarabie et la Bucovine septentrionale, à la Hongrie le nord de la Transylvanie, et à la Bulgarie, le sud de la Dobrodja.

La même année, à la suite d’un coup d’état du Général Antonescu, Carol II abdique en faveur de son fils le roi Michel, qui monte sur le trône pour la deuxième fois, à l’âge de 19 ans.

La Roumanie, en l’absence de soutien de la part des pays occidentaux, va lier son sort à l’Allemagne nazie, plaçant son économie entière sous la direction des allemands, ce qui conduisit le pays à une situation politique et économique catastrophique.

Le pays finira par entrer en guerre le 22 juin 1941, aux côtés de l’Allemagne, contre l’union soviétique, puis contre la Grande-Bretagne et les Etats-Unis.

Mais la bataille de Stalingrad, en septembre 1942- février 1943, au cours de laquelle l’armée roumaine, insuffisamment appuyée par les allemands, enregistra des pertes humaines et matérielles importantes, marque le début d’un mouvement d’opposition clandestine, mouvement qui organisera, en août 1944, l’insurrection de Bucarest, lorsque l’armée soviétique entra par la force dans la capitale.

Le roi Michel, voulant se joindre aux Alliés, fera arrêter le Général Antonescu, et renversera la dictature, avant de déclarer la guerre à l’Allemagne et à la Hongrie.

Par le traité de Paris de 1947, la Roumanie regagnera la Transylvanie, mais devra céder la Bessarabie et le nord de la Bucovine à l’union soviétique.

Un gouvernement pro-soviétique sera installé en 1945.

Le roi Michel essaiera en vain d’écarter les communistes mais, malgré le soutien populaire, il sera obligé d’abdiquer en décembre 1947 et de s’exiler.

lundi 14 janvier 2008

Les débuts du communisme et l'ère Ceaucescu


Le roi Michel essaiera en vain d’écarter les communistes mais, malgré le soutien populaire, il sera obligé d’abdiquer en décembre 1947 et de s’exiler.

Le pouvoir communiste s’installe alors par la force et proclame la République populaire de Roumanie, un pays complètement soviétisé.

Le parti ouvrier roumain imposera le principe du centralisme étatique : nationalisation du secteur privé de l’économie, collectivisation de l’agriculture, planification étatique de l’économie, industrialisation imposée, ouverture de camps de travail et de prisons…

La répression est très lourde à l’égard des intellectuels, des représentants de l’ancienne démocratie et de tous les opposants réels ou potentiels qui sont exterminés. La propagande soviétique se répand.

A la mort de Staline, en 1953, le premier secrétaire du parti ouvrier et président du conseil des ministres, Gheorghe Gheorghiu-Dej, devint, avec l’aide de Moscou, chef de l’état.

Il prend cependant vite ses distances avec Moscou pour se rapprocher de la Chine et entreprend une politique de destalinisation.

Il souhaite une ouverture internationale, mais la Roumanie reste malgré tout bien ancrée dans la sphère soviétique.

A sa mort, en 1965, Nicolae Ceaucescu, 37 ans, est coopté comme premier secrétaire du parti des travailleurs de Roumanie. Il rebaptise son pays la « République socialiste de Roumanie » et consolide sa position en se faisant élire, en 1967, en plus, comme président du conseil d'état.

Sa popularité dans les milieux de gauche européens est alors assez importante, en raison de sa politique indépendante à l'égard des dirigeants soviétiques. A l’intérieur du pays, l’ordre, la sécurité, et un niveau de vie acceptable par rapport à l’époque antérieure, entretiennent chez la population une certaine confiance.

Mais les premiers signes de dictature vont rapidement se faire sentir.

Dès 1966, projetant de porter à 30 millions la population roumaine en l’an 2000, Ceaucescu fait interdire l’avortement, la contraception et impose de sévères restrictions aux modalités du divorce.

Créant en 1974 le poste de président de la République, qu’il s’accorde, celui qui se surnomme le « génie des Carpates » ou le « Conducator » (soit le "guide" en roumain) et son épouse Elena, prétendument chercheur universitaire de haut niveau, directrice de l'Institut de recherche chimique, membre de l'Académie des Sciences roumaine et docteur honoris causa de très nombreuses universités à travers le monde (elle n'avait en réalité suivi que deux classes primaires), nommée par son mari n°2 du gouvernement, disposent d’un pouvoir absolu, et vont instaurer une dictature personnelle sans précédent.

L'historiographie roumaine de l'époque communiste le comparait d'ailleurs régulièrement avec les grands héros nationaux du passé.

Ces excès conduisirent le peintre Salvador Dalí à envoyer un télégramme de félicitations au conducător. Le quotidien du parti communiste Scînteia (L'étincelle), sans percevoir l'ironie de la démarche du peintre surréaliste, publia le texte du message dans ses colonnes, croyant y voir un témoignage de la gloire universelle du leader roumain.

Avec la « securitate », service de renseignements qui surveille les gens sur leurs lieux de travail et dans leur vie privée, les époux Ceaucescu mettent en place le régime communiste le plus sévère des pays de l’Est et mènent le pays à l’isolement international.

En 1972, Ceauşescu institue un programme de systématisation, inspiré des écrits d'Engels sur la réduction des différences ville-campagne. Conçue comme une manière de construire une société socialiste multilatéralement développée, cette ambitieuse politique se traduit par de nombreux bouleversements dans toute la Roumanie, et en particulier par la démolition systématique de nombreux villages, avec déplacement de la population dans des petites structures urbaines, souvent sans même attendre l'achèvement des programmes de construction.

A la fin des années 1970, Ceaucescu impose à la population un programme d’austérité destiné à rembourser la dette extérieure du pays en 3 ans : l’exportation est fortement augmentée, tandis que les importations sont bloquées.

Parallèlement, un programme scientifique de nutrition est mis en place, visant à rationner la population, grâce à des tickets de rationnement alimentaires.

Les projets pharaoniques (notamment le palais du peuple, à Bucarest, deuxième bâtiment au monde par sa superficie après le Pentagone !), à la gloire du parti et la propagande intensive contrastent avec la misère de la population qui n’est plus dupe depuis longtemps, mais craint la répression radicale immédiatement exercé par le régime à l’encontre de tout opposant, grâce à un véritable réseau d’informateurs.


samedi 12 janvier 2008

Le début de la révolution de 1989 et la vidéo de Ceaucescu sifflé pour la première fois


Le régime de Ceauşescu s'effondra après avoir ordonné aux forces armées et à la Securitate d'ouvrir le feu sur les manifestants anti-communistes dans la ville de Timişoara le 17 décembre 1989. Les manifestations faisaient suite à la tentative d'expulsion, par le régime, du pasteur hongrois László Tőkés. La rébellion se propagea à Bucarest, probablement aiguillonnée par la décision peu opportune de Ceauşescu d'y organiser le 21 décembre 1989 un rassemblement de masse, censé confirmer le soutien populaire au régime. La manifestation, diffusée en direct à la télévision, se transforma en une démonstration massive de protestation contre le régime. Huit minutes après le début du discours de Ceauşescu la foule crie « Timişoara » et Ceauşescu interrompt son discours avec inquiétude alors que la transmission télévisée est coupée. C'est un moment symboliquement historique car marquer ouvertement son mécontentement en plein meeting face à un haut chef communiste, le président de surcroît, était totalement inconcevable à cette époque. Les caméras officielles cessent alors de filmer le président et filment en plan fixe les immeubles de la place et des coins de ciel, tandis que Ceaucescu se met à dire à la foule : "a-lo! a-lo! a-lo! Alo, attendez tranquillement, chacun à sa place! a-lo! a-lo!", avant de reprendre la parole après quelques minutes pour promettre, effrayé, une augmentation des salaires totalement improvisée :



vendredi 11 janvier 2008

La fuite et l'exécution des époux Ceaucescu et la "fin" du régime communiste


Le lendemain les manifestants envahissent le bâtiment du Comité Central où Ceauşescu préside une réunion. Les époux Ceauşescu rejoignent alors un hélicoptère sur le toit du bâtiment pour s'enfuir avec deux conseillers et trois hommes d'équipage dans le but de rejoindre un palais de province et de reconstituer les forces encore fidèles au régime. Les manifestants s'attaquent ensuite à la chaîne de télévision publique et à 13h parviennent à en prendre le contrôle.


Selon la version officielle ultérieure, Nicolae et Elena Ceauşescu prirent la fuite en hélicoptère, prétendument en prenant en otage son pilote, menacé à l'aide d'une arme à feu. À cause de manque de carburant, le pilote posa l'hélicoptère dans la campagne, à proximité des bâtiments d'une ferme. S'en serait suivie une fuite erratique du couple présidentiel, au cours de laquelle il aurait notamment été pris en chasse par des citoyens insurgés tentant de les arrêter, avant de parvenir à trouver un répit de courte durée dans une école. Ils auraient finalement été retenus prisonniers pendant plusieurs heures dans une voiture de police, les policiers restant dans l'expectative et écoutant la radio pour deviner dans quel sens le vent allait tourner, avant d'être livrés aux forces armées.

Selon d'autres hypothèses, le général Stanculescu aurait œuvré pour des puissances étrangères (la CIA et le KGB voulant tous deux se débarrasser du dirigeant) et le détournement de l'hélicoptère présidentiel ne serait pas dû au hasard.

Le 25 décembre 1989, à la suite d'un "procès" expéditif de 55 minutes rendu par un tribunal auto-proclamé (une cour martiale de complaisance), réuni en secret dans une école de Târgovişte à 50 km de Bucarest, Nicolae Ceauşescu et Elena Petrescu, coupables de génocide, étaient condamnés à mort et aussitôt fusillés dans la base militaire de Târgovişte.

Le soir même les images des corps exécutés du couple Ceauşescu seront diffusées à la télévision. On remarque à cette occasion que les blessures des 2 corps à la tête ne correspondent pas aux impacts de balles du mur derrière eux, situés plutôt au niveau des hanches. Les cadavres seront enterrés dans un cimetière de Bucarest dans une tombe sans nom.

Après la fuite de Ceauşescu, le chaos s’installe à Bucarest. Les révoltés envahissent le bâtiment du Comité Central et les bureaux sont vandalisés. Les portraits du dictateur sont jetés. La télévision roumaine recommence à émettre, et annonce la fuite du dictateur. La suite n'est pas vraiment claire. Des nouveaux gouvernements se forment, avec des membres du parti communiste. La foule demande un gouvernement sans communistes. Partout, il apparaît des assassins cachés qui commencent à tirer dans la population. Ils sont appelés « terroristes ». On demande à l’armée de défendre la télévision. Celle-ci transmet des informations contradictoires. Il y a des nombreux morts et des dégâts matériels. A l’aéroport Otopeni de Bucarest, deux compagnies de l’armée luttent l’une contre l’autre, en disant qu’ils luttent contre les terroristes.

Dans l'après-midi Iliescu, Roman et Voican établissent un gouvernement provisoire et Ion Iliescu (ancien du régime communiste) annonce à la télévision la création du Front du Salut National.

Les « terroristes » attaquent des lieux importants de la vie sociopolitique – la radio, la télévision, le centre de presse, les aéroports, et le ministère de la défense. La nuit du 22 au 23 décembre, les citoyens restent dans les rues et dans les zones de siège pour protéger les institutions libérées.

Aujourd’hui, après 18 ans, on ne sait pas encore toute la vérité. Il y a plusieurs hypothèses, défendues par plusieurs personnalités :

une révolution spontanée (l'hypothèse la plus probable serait celle d'une révolution spontanée suivie d'un coup d'état lorsque certains ont senti le vent tourner),

un coup d’état interne,

un coup d’état avec l'aide de services secrets étrangers (hypothèse très peu probable).

L’identité de ces « terroristes » est resté un mystère jusqu'à présent, ainsi que leur relation avec le régime actuel. Aucun « terroriste » n’a été retrouvé ou condamné. D’après quelques informations, c’était un coup d’état, et le général Stanculescu aurait créé des « scénarios » avec des terroristes pour maintenir la peur.

Selon d'autres hypothèses, le général Stanculescu aurait œuvré pour des puissances étrangères (la CIA et le KGB voulant tous deux se débarrasser du dirigeant) et le détournement de l'hélicoptère présidentiel ne serait pas dû au hasard.

Les livres sur ce sujet présentent des opinions divergentes, ainsi que les manuels d’histoire.


Quoi qu’il en soit, de tous les pays de l'Est ayant renversé le régime communiste après la chute du mur de Berlin au cours de l'automne et l'hiver 1989-1990, la Roumanie fut le seul où cette métamorphose se fit dans le sang : 1 104 morts (dont à Bucarest 564, Timişoara 93, Sibiu 90, Braşov 66, Cluj-Napoca 26) et 3 321 blessés (dont Bucarest 1 761).


jeudi 10 janvier 2008

Le cheminement difficile vers la démocratie et le bond économique des dernières années


Ion Iliescu, dignitaire du régime communiste reconverti dans la démocratie « à l'occidentale », remportera la première élection présidentielle de l'ère post-communiste mais ne parviendra pas à stopper la scission de son parti, née de profonds désaccords avec son premier ministre Petre Roman (fondateur du Parti démocrate - PD). Le déclin économique et le blocage des réformes amplifient le mécontentement populaire.


En 1996, il perdra l’élection présidentielle, devant le candidat d'une coalition de centre-droit (CDR), Emil Constantinescu, lequel s'avèrera être finalement une désillusion pour ses partisans, comme l'alliance CDR (libéraux-centristes-conservateurs-magyars) au gouvernement. Les couches populaires sont gravement touchées par la pauvreté et le coût social des réformes économiques d'inspiration libérales.

Ion Iliescu, encore une fois, capitalisera avec succès cette situation et, à la tête du parti social-démocrate (PSD), gagnera les élections présidentielle et législatives de 2000.

Iliescu ne pouvant plus, en raison des dispositions constitutionnelles interdisant à un président de faire plus de deux mandats, se présenter à l'élection présidentielle de 2004, Adrian Năstase sera le candidat du PSD, mais ne réussira pas à l’emporter devant Traian Băsescu, chef du PD, issu de la scission avec le PSD.

Quoi qu'il en soit, après une décennie de stagnation ayant suivi la révolution de 1989 et la chute du communisme, l'économie roumaine est en très forte croissance depuis 2001 (4 à 8 % par an).
Son PIB en parité de pouvoir d'achat (247 milliards de dollars) place le pays au 45e rang mondial en 2007, au niveau du PIB tchèque.

La majorité au pouvoir a mis en place une politique économique d'inspiration libérale, visant à réduire le nombre des entreprises d'état (encore autour de 30 % du PIB en 2006), attirer plus d'investissements étrangers (la Roumanie est la 7e destination en Europe d'après le Financial Times), réduire la fiscalité et le chômage (4,3 % en janvier 2008), tout cela afin de pouvoir faire face à la concurrence à l'intérieur de l'union européenne.

Le journal Le Monde a remarqué qu'en 2005 et 2006, la Roumanie a attiré 15 milliards d'euros d'investissements étrangers, soit plus que les 14 milliards d'euros attirés entre 1990 et 2004 !
Le chiffre s'est maintenu l'année suivante, car l'année 2007 a attiré 7 milliards d'euros d'IDE.

Aujourd'hui, la Roumanie est un pays complexe, hétéroclite et paradoxal, où les charrettes tirées par les bœufs croisent les voitures de luxe, en somme, un pays échappant à tous les clichés, véritable univers d'inspiration pour les âmes d'artiste !